Ateliers d'haromisation

2012 Conduite à tenir devant une anomalie biologique découverte lors du bilan pré don cellules souches hématopoïétiques – Test de grossesse positif et gammapathie monoclonale

Introduction

Selon la réglementation française, le don de cellules souches hématopoïétiques (CSH) ne doit faire courir aucun risque au donneur, son geste ne lui apportant pas de bénéfice direct. Les différents examens réalisés avant la greffe doivent donc permettre de répondre à cette exigence. L’existence d’une grossesse chez une donneuse est une situation d’autant plus fréquente que les registres de donneurs volontaires sont composés majoritairement de femmes. La démarche du centre de greffe devra prendre en compte l’urgence de la réalisation de la greffe et la nécessité de ne pas nuire à la donneuse. Le but du bilan pré-greffe est par ailleurs de dépister une éventuelle maladie qui pourrait être transmise au receveur. Dans le même temps, l’âge des receveurs a augmenté et, par voie de conséquence, celui des donneurs familiaux, avec les risques inhérents de pathologies liées au vieillissement. La probabilité de découverte fortuite d’une gammapathie monoclonale a ainsi augmenté, du moins d’un point de vue théorique (aucune étude ne permettant d’en connaître l’incidence chez les donneurs de CSH). Nous avons donc cherché à définir des recommandations concernant la conduite à tenir lorsque une donneuse est enceinte et en cas de découverte d’une gammapathie monoclonale chez un donneur.

1. Grossesse

Compte tenu des risques potentiels pour la donneuse et son fœtus, la grossesse est une contre-indication temporaire au don de CSH, tant pour les greffes familiales que non-apparentées. En post-partum, il est recommandé d’attendre un délai de 6 mois avant d’autoriser le don. Ce délai peut être prolongé jusqu’à la fin de l’allaitement s’il est poursuivi au delà de 6 mois. Il convient donc de rechercher un donneur alternatif si la greffe ne peut être décalée à une date respectant ces impératifs.

Néanmoins, la principale complication redoutée en post-partum est la thrombose veineuse profonde. Or, ce risque ne serait significativement majoré que lors des 6 semaines suivant un accouchement ou une interruption de grossesse (1) . Ainsi, si la greffe est urgente et qu’aucun donneur alternatif n’est disponible, un prélèvement de CSH pourrait être envisagé entre 6 semaines et 6 mois après la fin de la grossesse. Cette procédure ne serait cependant envisageable que chez une donneuse familiale qui bénéficierait d’une information éclairée et signerait un consentement exposant les éventuels risques encourus.

2. Gammapathie monoclonale

Sur un plan réglementaire, il n’est pas obligatoire de réaliser une électrophorèse des protides sériques (EPS) chez le donneur. Toutefois, l’âge grandissant des receveurs, et donc des donneurs familiaux, nous conduit à élargir la prescription de cet examen. Bien que bénigne, une gammapathie monoclonale de signification indéterminée (MGUS) a un risque évolutif d’environ 1% par an vers une hémopathie lymphoïde maligne (2) . Les patients atteints de MGUS auraient ainsi un risque relatif de progression 7 fois plus élevé que la population générale, et 90% des myélomes multiples seraient précédés par une MGUS (3) . Cependant, les conséquences sur le receveur d’une greffe de CSH à partir d’un donneur atteint de MGUS ne sont pas connues. Concernant la transplantation d’organes solides, le risque d’évolution vers un myélome multiple ne serait pas majoré en cas de MGUS préexistante chez un donneur (4) . Ces résultats ne paraissent néanmoins pas transposables à la greffe de CSH, où la cellule clonale responsable de la gammapathie peut potentiellement être directement transplantée chez le receveur.

Nous recommandons donc de rechercher un autre donneur en cas de découverte d’un pic monoclonal sur l’EPS. Pour les greffes non-apparentées, le donneur volontaire est dans tous les cas récusé. En revanche, si aucune alternative n’est trouvée et qu’il s’agit d’un donneur familial, il convient de compléter le bilan diagnostique afin d’éliminer une hémopathie sous-jacente :

  • En cas de MGUS : étant donné l’absence de données dans la littérature, la décision revient au centre greffeur, qui devra peser la balance entre les bénéfices attendus et les risques potentiels pour le receveur. La greffe pourrait alors être maintenue après avoir informé et recueilli le consentement éclairé du receveur.
  • En cas d’hémopathie avérée : la greffe est annulée et le donneur doit être pris en charge pour sa maladie.

Questions résiduelles

Le recul de l’âge autorisant la greffe nous conduit à nous interroger sur la gestion globale du donneur âgé. La réalisation d’un immunophénotypage systématique chez le donneur de plus de 50 ans reste discutée. Il paraît également nécessaire de réaliser des études afin d’évaluer l’impact des comorbidités sur le don, et notamment le risque thromboembolique encouru. Enfin, une meilleure harmonisation du bilan du donneur est souhaitable entre les différents centres.

RÉFÉRENCES

1. Salonen Ros H, Lichtenstein P, Bellocco R, Petersson G, Cnattingius S. Increased risks of circulatory diseases in late pregnancy and puerperium. Epidemiology. 2001 Jul;12(4):456–60.

2. Kyle RA, Durie BGM, Rajkumar SV, Landgren O, Blade J, Merlini G, et al. Monoclonal gammopathy of undetermined significance (MGUS) and smoldering (asymptomatic) multiple myeloma: IMWG consensus perspectives risk factors for progression and guidelines for monitoring and management. Leukemia. 2010 Jun;24(6):1121–7.

3. Weiss BM, Abadie J, Verma P, Howard RS, Kuehl WM. A monoclonal gammopathy precedes multiple myeloma in most patients. Blood. 2009 May 28;113(22):5418–22.

4. Jimenez-Zepeda VH, Heilman RL, Engel RA, Carey EJ, Freeman C, Rakela J, et al. Monoclonal gammopathy of undetermined significance does not affect outcomes in patients undergoing solid organ transplants. Transplantation. 2011 Sep 15;92(5):570–4.

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